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Marc Jurt

Marc Jurt est né en 1955 à St-Blaise. Après ses études à Neuchâtel, il suit les cours de l’Ecole des Beaux-Arts de Genève. Il enseigne le dessin et la gravure. Présent dans de nombreuses collections privées et publiques, lauréat de plusieurs bourses, Marc Jurt poursuit son oeuvre par un travail régulier de la gravure et de la peinture en atelier ainsi que dans le cadre de nombreux et longs voyages, avec un intérêt très marqué pour des destinations en Asie. Il séjourne régulièrement à Bali. Il nous quitte le 15 mai 2006 à l’âge de 51 ans.

“Pour moi, la relation avec les éléments fondamentaux de l’univers – la terre, l’air, l’eau et le feu- est essentielle. En tant qu’êtres humains, nous faisons corps avec ces éléments. En outre, ces éléments nous impose leur force et donc le respect, ce qui n’empêche pas que nous devons parfois lutter contre eux pour survivre. Quand je commence un tableau, s’installe aussi une espèce de lutte entre les forces mises en présence les unes des autres et qui veulent à tout prix s’exprimer ou exister.
Enfin, sans vouloir parler de spiritualité, je suis convaincu que notre existence répond à une relation verticale entre la terre et le ciel et que nous sommes nourris par les éléments de l’univers. Un tableau répond aussi à cette loi. Pour exister, c’est-à-dire lorsqu’il est habité, il travaille de manière horizontale en créant le dialogue entre les autres, et il existe de manière verticale, parce qu’il est ancré dans la réalité des émotions et parce qu’il met en présence les unes des autres les forces de l’univers, les éléments fondamentaux que l’on trouve dans la nature. “


Marc Jurt

Entretien avec Armande Reymond
in “Marc Jurt”, Editions Vie Art Cité,
Lausanne, 2000, p.23

Le chroniqueur de la forêt de bambous
In memoriam Marc Jurt de Michel Butor


1.
Où te faufiles-tu Marc
je te perds parmi les tiges
que tu fais bruire en passant
devenu un courant d'air
qui ranime les échos
d'une moitié de la Terre
au moment de son réveil

C'est la sève qui attaque
le cuivre des jours anciens
c'est l'encre de l'insomnie
qui l'imprime sur les feuilles
dont les fibres sont pressées
par le rouleau de l'attente
dans des années de survie

Voyageur infatigable
reprenant respirations
à chaque franchissement
d'une frontière à visa
comme un dauphin transportant
un poète naufragé
qui rajeunit sur son dos

Frottements et froissements
incisions et coups d'épée
dans l'eau du temps menaçant
labourages de vernis
dans les champs de la vision
polissages de métaux
pour les écrans du sommeil

Techniques multipliées
palimpsestes en vadrouille
pas une seule semaine
sans trace pour assurer
vitalité provisoire
quand on se sait condamné
comme les autres vivants

Géographie parallèle
dérive des continents
isobares isothermes
courbes de niveau profils
statistiques et légendes
effervescence des mers
fécondité des volcans

Après tant d'errances grises
de médications brutales
d'odeurs de désinfectants
frappant à toutes les portes
dans les couloirs d'hôpitaux
pour se trouver enfin libre
dans un sursis de bonheur

 

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